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Perturbateurs endocriniens : la définition adoptée par l'Europe est très controversée

mercredi 02 août 2017 @ 04:11:35

Sujet : Défense de l'Environnement

La Commission européenne a adopté, avec 4 ans de retard, la définition des perturbateurs endocriniens, pierre angulaire d’un cadre législatif pour ces substances aux effets nocifs sur la santé. Ce texte est qualifié d’incroyable "reculade" par les associations écologistes et d’"avancée considérable" par le ministre de l’Environnement  qui annonce dans le même temps plusieurs mesures nationales.



Sommaire
  1. La Commission adopte (enfin) une définition des perturbateurs endocriniens
  2. Cette définition controversée est-elle une avancée ou une reculade ?
  3. Le gouvernement annonce 9 mesures nationales

Perturbateurs endocriniens

Présents dans notre environnement, notre alimentation et dans certains médicaments, les perturbateurs endocriniens sont des substances polluantes issues de l’activité humaine qui peuvent avoir des effets nocifs sur la santé, notamment sur le système endocrinien. Isolément ou en association, ces substances sont suspectées de provoquer des altérations physiologiques ou métaboliques conduisant à des cancers, de l’obésité ou du diabète. Face à ces substances, l’Europe tarde à adopter un cadre législatif dont la première étape est la définition même de ce qu’est un perturbateur endocrinien.

La Commission adopte (enfin) une définition des perturbateurs endocriniens

Cette définition légale devait être formulée par la Commission avant la fin 2013 en s’appuyant sur des critères scientifiques. Au-delà du débat scientifique, l’influence des lobbies semble avoir pesé de tout leur poids pour retarder cette étape. Fin 2014, face à l’inaction de la Commission, la Suède saisit le tribunal de la Cour de Justice de l’Union européenne, qui condamne la Commission pour "manquement à ses obligations".

La bataille entre les tenants du principe de précaution et les partisans d’une version moins contraignante pour l’industrie n’avait pas permis jusqu’alors d’obtenir la majorité qualifiée des Etats membres. D’un côté, la France, le Danemark et la Suède jugeait le texte trop peu protecteur pour la santé publique et l’environnement. De l’autre, plusieurs pays avec pour chef de file l’Allemagne plaident en faveur d’une version moins contraignante pour l’industrie  Le 4 juillet, le revirement de la France a permis l’adoption des critères de définition des perturbateurs endocriniens utilisés dans les pesticides. Un épilogue présenté par les associations de défense de l’environnement comme une reculade et par les ministères de l’Environnement et de l’Agriculture comme une avancée, qu’ils accompagnent de mesures nationales.

Cette définition controversée est-elle une avancée ou une reculade ?

Les ministères de l’Environnement, de la Santé et de l’Agriculture ont mis en avant les avancées de ce texte :

Mais ce sont notamment ces exemptions (non précisées dans le communiqué conjoint des trois ministères) qui sont très critiquées par les associations de défense de l’environnement. Leurs principales réserves sont que :

La députée européenne Michèle Rivasi dénonce "une reculade". L’ancienne ministre Corinne Lepage dénonce une définition "inacceptable" et "minimaliste".

Les lobbys de la chimie doivent sabler le champagne après le soutien de la France à la définition minimaliste des perturbateurs endocriniens

 

L’association Générations Futures regrette que la France permette "l’adoption de critères insuffisants pour protéger la santé humaine et l’environnement". Le réseau Santé Environnement juge que "la Commission Européenne continue de mener une bataille d’arrière-garde contre l’évidence scientifique". Les deux associations prennent cependant acte prend acte des 9 engagements des ministres de la transition écologique, de la santé et de l’agriculture de développer une politique ambitieuse à l’échelle nationale d’élimination des perturbateurs endocriniens.

Le gouvernement annonce 9 mesures nationales

Par ailleurs, Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, et Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation avancent 9 mesures nationales pour réduire l’exposition et les risques que liés aux perturbateurs endocriniens, améliorer la transparence sur les produits phytopharmaceutiques et biocides mis sur le marché français, renforcer l’information des consommateurs et augmenter les moyens de la recherche sur les perturbateurs endocriniens et leur substitution.

S’agissant des substances concernées par l’exemption (les pesticides), le ministre de l’Environnement précise que "dès lors que des préoccupations s’expriment, le Gouvernement s’engage à utiliser la procédure prévue par le droit européen permettant, sur la base d’analyses scientifiques et techniques menées au niveau national, d’interdire la mise sur le marché français de produits contenant ces substances ( ) Les ministres de la Transition écologique et solidaire, des Solidarités et de la Santé, et de l’Agriculture et de l’Alimentation, saisiront l’ANSES pour mener une évaluation des risques des produits les plus utilisés contenant ces substances. Les remises de rapports seront suivies dans le mois de travaux conjoints avec les industriels, les agriculteurs et la société civile pour apprécier la décision à prendre à la lumière de cette évaluation et conduire, le cas échéant, l’Etat à interdire certains produits au niveau national". Mais interdire sur le territoire national le recours ou l'importation de produits traités avec des certains pesticides pourrait ne pas être si faciles à mettre en Œuvre, car elles entraîneraient des distorsions de concurrence et des entraves à la circulation des marchandises au sein de l’Union européenne.

Au niveau européen, la grande saga n’est pas pour autant terminée, puisque le texte doit désormais être examiné dans les 4 mois par le Parlement, qui peut s’y opposer s’il recueille une majorité absolue à son encontre.

Ecrit par:  David Bême

 Créé le 05 juillet 2017

Sources :  Communiqué conjoint des ministères de l'Environnement, de l'Agriculture et de la Santé - juillet 2017

Communiqué de Générations futures  - juillet 2017

Communiqué de Réseau Santé Environnement  - juillet 2017

Le Monde du 4 juillet 2017

Photo : PDN/SIPA - Le ministre de l'Environnement Nicolas Hulot et le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert le 28 juin 2017 




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